

LES RECHERCHES SUR LE CINABRE


Le noircissement du cinabre
Le noircissement du cinabre lors de son exposition à la lumière est connu depuis l’antiquité. Une citation de Vitruve, par exemple, architecte romain du Ier siècle av. J. –C. mentionne déjà cette problématique dans son traité sur l’architecture : " […] lorsqu’il a été étendu sur les revêtements couverts des pièces closes, il garde sa couleur sans s’altérer. Mais dans les lieux ouverts […] où le soleil peut faire pénétrer ses rayons et la lune son éclat, dès qu’un endroit peint de cinabre en est touché, celui-ci s’altère, et, ayant perdu sa vertu colorante, il noircit ". (Vitruve, De Architectura, VII, 9,2).
Dès leur découverte les enduits peints du site de la Verrerie ont confronté les restaurateurs à cette problématique majeure de conservation : le risque d’altération chromatique du pigment cinabre. Déjà lors des fouilles archéologiques il a fallu redoubler de prudence sur le site pour minimiser l’impact de la lumière. Des mesures de précautions ont été prises mais malgré tout le phénomène de noircissement a été observé sur une zone.


Les restaurateurs au cœur d’une démarche scientifique : le cinabre
Cette altération chromatique du rouge cinabre relève de phénomènes physico-chimiques très complexes et elle n’est pas encore parfaitement comprise par les chercheurs.
Les restaurateurs tentent de maitriser les différents facteurs en cause et leur rôle consiste à trouver des solutions pour minimiser ces risques de noircissement. Cette recherche engage des réflexions pluridisciplinaires et a amené les restaurateurs à mettre en place différents partenariats scientifiques.
Des pistes prometteuses émergent grâce à une méthodologie rigoureuse consistant à réaliser des tests sur des fragments d’enduits peints provenant du site :
- La recherche sur le dessalement des matériaux démontre que ce type de traitement permet de limiter l’altération
- La recherche sur la maitrise de l’environnement lumineux vise à limiter les risques liés à l’exposition à la lumière
Au vu de la complexité des réactions chimiques conduisant à cette dégradation de la couleur, il faudra encore plusieurs années pour pouvoir définir des protocoles de conservation-restauration permettant d’assurer la préservation de ces peintures à long terme.
L’atelier est pleinement engagé dans ces recherches dont les résultats conditionneront la future présentation au public de ces peintures très fragiles.










PUBLICATIONS
- M.-P. Rothé, M. Rapilliard , A. Martin, La maison de la Harpiste : archéologues et restaurateur au chevet de son décor, XIVes Journées de l’ANACT tenue le 13 et 14 octobre 2022, Bordeaux, Cahiers techniques de l’ARAAFU (collection CRBC, 28), p. 73-93. (disponible en ligne)
- A. Martin, M. Rapilliard, « Conservation-restauration de l’ensemble dit du Poète (fin du IIe s. ap. J.-C., Arles : réflexions autour de la problématique du noircissement du cinabre », dans Boislève J., Carrive M., Monier F. (dir.), Peintures et stucs d’époque romaine, études toichographologiques, : Actes du 32e colloque de l’AFPMA, Nîmes, 22 et 23 novembre 2019, Bordeaux, Ausonius (coll. Pictor, 11), p. 203-219
- T. de Seauve, M. Rapilliard, G. Martinet, A. Martin et J-M. Vallet, « Recherche d’un traitement de conservation du cinabre contre son noircissement : cas des peintures murales de la maison d’Aiôn (Arles, IIe-IIIe siècles ap. J.-C.) », Technè, 56, 2023, 80-88.
- M.-P. Rothé, M. Rapilliard « Archéologues et restaurateurs au chevet d’un exceptionnel décor » dans revue L’Archéologue, n°169, mars-mai 2024
ÉQUIPE TRAVAILLANT SUR LES RECHERCHES SUR L’ALTÉRATION DU PIGMENT CINABRE
Au sein du musée départemental Arles antique ces travaux sont portés par : Marion Rapilliard (conservatrice-restauratrice) et Aurélie Martin (conservatrice-restauratrice).
Les collaborateurs scientifiques dépendent de plusieurs institutions :
? CICRP (Centre Interdisciplinaire de Conservation Restauration du Patrimoine, Marseille) : Jean-Marc Vallet (ingénieur, géologue), Théa De Seauve (ingénieure) ; Odile Guillon (photographe)
? Entreprise Aslé Conseil : Gilles Martinet (docteur en géosciences)
? Université d’Avignon, Ingénierie de la restauration des patrimoines naturel et culturel : Catherine Vieillescazes (IMBE), Gerald Culioli (IMBE)
? University of the Basque Country UPV/EHU, IBea Research group (Espagne): Maite Maguregui (chimiste)
? Ezrati Conseil : Jean-Jacques Ezrati, éclairagiste conseil
? CNRS-MC : Ann Bourgès (ingénieure de recherche, docteur en géosciences, C2RMF) (programme de recherches DIM PAMIR - DEGEL)